Dans un contexte d’instabilité croissante, garantir la résilience de sa supply chain est devenu un impératif stratégique pour les entreprises. Les perturbations ne cessent de s’intensifier – catastrophes naturelles, tensions géopolitiques, nouvelles réglementations environnementales, cyberattaques… – rendant les modèles traditionnels, s’appuyant principalement sur la planification, insuffisants pour rester performant et compétitif.
Désormais, l’enjeu est d’avoir une supply chain flexible et capable de réagir en temps réel, pour assurer la continuité des opérations tout en réduisant les dépenses et l’impact écologique, sans pénaliser l’expérience client.
Tensions croissantes et risques émergents, les nouveaux défis de la supply chain
De récentes études confirment cette multiplication des risques. Selon l’analyse de Resilinc, les interruptions d’approvisionnement ont augmenté de 30 % au premier semestre 2024 par rapport à l’année précédente. Parmi les menaces les plus préoccupantes, les catastrophes naturelles ont augmenté de 130 %, avec une recrudescence marquée des inondations et incendies de forêt. Les grèves et mouvements sociaux ont progressé de 42 %. Par ailleurs, avec la mise en place de directives telles que la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), les entreprises européennes font face à des contraintes de plus en plus fortes sur leur supply chain.
L’étude McKinsey « Global Supply Chain Leader Survey 2024 » confirme cette tendance : 68 % des dirigeants interrogés estiment que leur supply chain est plus exposée aux risques aujourd’hui qu’il y a deux ans. Près de la moitié d’entre eux déclarent avoir connu au moins une interruption majeure de leur supply chain au cours des 12 derniers mois.
Enfin, l’augmentation des droits de douane imposée par les États-Unis accentue les tensions commerciales et rend le contexte d’autant plus complexe. Ces mesures perturberont l’équilibre actuel entre l’offre et la demande et obligeront les entreprises à adapter rapidement leurs stratégies logistiques pour protéger leurs marges et assurer la satisfaction client, malgré les frictions potentielles dans la gestion des commandes.
Face à cette réalité, il est crucial d’adopter une approche à la fois proactive et réactive, en faisant en sorte que la planification et l’exécution travaillent de concert et en temps réel pour atteindre l’excellence opérationnelle, favoriser la croissance et respecter les engagements de l’entreprise envers ses clients. Trop souvent, on observe une rupture entre la gestion stratégique et opérationnelle de la supply chain, alors que ces deux dimensions doivent travailler de concert.
Digitalisation et intégration des acteurs
L’accélération de la digitalisation constitue un axe clé. L’une des principales failles des entreprises réside dans le manque de visibilité sur l’ensemble de leur supply chain (ou “N-tier supply chain”). Beaucoup ne disposent pas d’une vision précise sur leurs fournisseurs secondaires et tertiaires, rendant l’anticipation des risques difficile. Selon l’étude McKinsey, 60 % des entreprises déclarent aujourd’hui avoir une bonne visibilité sur leurs fournisseurs de rang 1. Ce chiffre marque une progression notable, avec une augmentation de 10 points par an au cours des deux dernières années. Toutefois, cette amélioration s’est faite au détriment de la cartographie des fournisseurs de rangs 2 et 3, qui continue de reculer pour la deuxième année consécutive.
La mise en place de solutions d’orchestration de la supply chain parfaitement intégrées, permettant la récolte et le partage d’informations en temps réel sur l’ensemble de l’écosystème de la supply chain, est essentielle. Elles simplifient également le déploiement d’un système de traçabilité, particulièrement utile pour répondre aux nouveaux enjeux de reverse logistics.
Orchestration en temps réel
La transformation digitale, notamment pour l’orchestration de la supply chain via des solutions d’Order Management, offre des solutions concrètes pour détecter les anomalies en temps réel, optimiser la gestion des stocks et automatiser certains arbitrages face aux aléas – le tout en prenant en compte les capacités de l’ensemble de la N-tier supply chain. Ces systèmes ne se contentent plus d’analyser ou de recommander : ils permettent désormais d’enclencher automatiquement les actions correctives, en minimisant le délai entre la détection d’un incident et la mise en œuvre d’une solution opérationnelle.
Ces solutions sont adaptées aux besoins spécifiques de chaque métier, au contexte opérationnel et aux priorités stratégiques de chaque entreprise. Grâce à des mécanismes d’arbitrage en temps réel, les décisions – qu’il s’agisse d’assigner une commande à un entrepôt, de prioriser une livraison ou de réorienter un flux logistique – peuvent être prises et exécutées en quelques secondes, en tenant compte de critères multiples : disponibilité, délais, coûts, capacité de préparation ou de transport, typologie client, engagements contractuels ou même des critères d’impact environnemental tels que l’empreinte carbone générée par le schéma de transport.
L’objectif n’est pas seulement de réagir vite, mais de choisir la meilleure alternative possible : celle qui respecte la promesse faite au client tout en optimisant les coûts et en limitant l’impact environnemental. Cette capacité à arbitrer intelligemment et à opérer sans rupture, même en contexte défavorable , devient un facteur clé de résilience et de compétitivité.
Par ailleurs, l’intégration étroite avec l’écosystème – fournisseurs, transporteurs, prestataires, points de vente – offre une visibilité partagée sur les flux. Elle permet d’anticiper, simuler et reconfigurer les parcours logistiques selon différents scénarios, de manière agile et sans complexifier les opérations. Les entreprises peuvent ainsi s’appuyer sur une supply chain connectée, réactive et pilotée par la donnée, capable de concilier performance économique, efficacité opérationnelle, durabilité et qualité de service.
Collaboration et transparence : un levier de transformation durable
En outre, la transparence et la collaboration entre les acteurs de la supply chain doivent être renforcées. La crise sanitaire a mis en évidence les faiblesses d’un fonctionnement en silos, où chaque maillon tente d’optimiser ses propres processus sans avoir une vision d’ensemble. Pourtant, la capacité à partager rapidement les informations et à coordonner les efforts entre fabricants, sous-traitants, transporteurs et distributeurs est un facteur clé de résilience. L’analyse de Resilinc montre que 58 % des entreprises ayant mis en place des dispositifs collaboratifs de gestion de crise ont réussi à atténuer significativement l’impact des perturbations. Là encore, la clef réside dans des solutions qui favorisent une interconnexion fluide entre tous les acteurs de la supply chain et permettent donc une activation dynamique, rapide, dynamique et efficace des solutions alternatives en cas d’imprévu.
Optimisation de la supply chain au service de la promesse client et de l’excellence opérationnelle
L’Europe est aujourd’hui à un tournant. Proposition de reformulation : Entre la baisse de la production industrielle dans certaines grandes économies, la pression sur les coûts et les marges, la réglementation accrue et les attentes croissantes des consommateurs en matière de durabilité et d’expérience, une révision en profondeur des modèles logistiques s’impose. Les entreprises doivent désormais aligner leur supply chain avec deux promesses fondamentales :
- La promesse client : assurer un approvisionnement sans rupture, garantir une livraison en temps et en heure (OTIF – On Time In Full) même en cas d’aléas.
- La promesse d’excellence opérationnelle : maîtriser les coûts, optimiser l’efficience des flux et réduire l’empreinte carbone.
Face à un environnement instable et exigeant, la résilience ne se décrète pas, elle se construit dans l’action : en orchestrant les flux en temps réel, en intégrant l’ensemble des partenaires de la chaîne, et en alignant chaque décision opérationnelle avec la promesse faite au client.
Plus qu’une question d’outils, la résilience repose sur une nouvelle manière de piloter la supply chain : connectée, collaborative et orientée promesse client. Les entreprises qui sauront activer cette dynamique transformeront l’incertitude en avantage concurrentiel durable.
Sources :
McKinsey Supply Chain Risk Survey – « Supply Chain Risk Survey 2024 », accessible à McKinsey
SCMR – The 10 Top Disruptions in 2024 – Article publié sur SCMR, accessible à SCMR
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