Alors que les commerçants, concurrencés par les plateformes chinoises, réclament à cor et à cri des règles plus équitables et le respect des normes européennes par tous, leur activité affiche une baisse en juin et les soldes ont mal démarré.
«C’est la pire évolution mensuelle depuis début 2025», alerte Procos. La Fédération du commerce spécialisé qui vient de dresser le bilan des ventes en magasin en juin annonce une baisse de moins 3,2 % comparativement à l’an passé. Les mois les plus dégradés jusqu’ici avaient été janvier et février qui avaient chacun connu une baisse de moins 1,2 % seulement. «Les ventes ont été fortement impactées par le long et exceptionnel épisode caniculaire. En particulier, l’alimentaire spécialisé qui termine le mois en forte baisse à – 9,6 %. Tous les secteurs du panel sont marqués par une activité en baisse», note la fédération, rappelant toutefois que l’impact calendaire était négatif avec un samedi de moins qu’en juin 2024.
Pour certains secteurs, la baisse des ventes en magasins à surface égale est conséquente : beauté-parfumerie (- 5,5 %), restauration (- 6,2 %), culture-cadeaux-jouets (-3 %) et l’équipement de la maison (- 3,1 %). Dans ce dernier secteur, la situation des sous-secteurs est très hétérogène, la baisse des ventes de meubles étant estimée à moins 10,7 % selon l’IPEA (Institut de Prospective et d’Études de l’Ameublement).
Des soldes qui commencent mal
Dans un tel contexte, l’habillement a mieux résisté selon Procos car les ventes magasins n’ont baissé que de moins 0,5 % sur le mois. «La canicule ayant contraint le déplacement des consommateurs vers les lieux de vente, a profité aux ventes web qui terminent juin en hausse de plus 4,2 % par rapport à 2024. Internet a bénéficié d’un transfert d’activité aux dépens des points de vente puisque l’écart est de huit points sur ce mois, ce qui est très important et totalement inhabituel.» La forte baisse de fréquentation des magasins de moins 4,3 % en juin est «conforme avec ces hypothèses d’impact fort de la canicule sur le comportement des consommateurs.» La première semaine de soldes a été fortement en retrait par rapport à la même période en 2025 à moins 4,8 % dont moins 8 % pour le seul habillement. Ce début de période est marqué par une baisse de la fréquentation en magasin de moins 6% et une diminution du panier moyen de moins 3% selon l’Alliance du commerce.
«Notons qu’en général, lorsque la première semaine de soldes n’est pas bonne, cela annonce le plus souvent des soldes médiocres. Toutefois, cette année, attendons l’impact de la fin de la canicule et par ailleurs, les conséquences d’effet de base car l’an passé les ventes de début juillet 2024 avaient été mauvaises, en particulier à Paris, du fait des changements de destination des touristes inquiets de l’incidence des Jeux Olympiques sur la vie parisienne. Voyons si le retour à la normale cette année permet de soutenir avant le départ en vacances des grandes métropoles», souligne Procos.
Un semestre en légère hausse
En cumul sur l’ensemble du premier semestre, les ventes des magasins des enseignes du commerce spécialisé terminent la période en très légère hausse + 0,5 % soit une croissance inférieure à l’inflation de la période. En 2024, les ventes avaient augmenté de + 2,5 % par rapport à 2023.
Les ventes magasins en cumul sur le semestre sont en hausse de + 1,3 % pour l’habillement, culture-cadeaux-jouets (+ 2,1 %) et le sport (+ 1,2 %). L’évolution est nulle pour l’alimentaire spécialisé (+ 0,2 % vs la même période en 2024). La beauté-parfumerie termine le semestre à – 4,7 % ; «un retrait très sensible par rapport à 2024 et très inhabituel au regard des dynamiques de ces dernières années. » L’équipement de la maison est toujours en baisse d’activité avec une moyenne sectorielle du panel à -2,3 % mais surtout des baisses très fortes dans certains segments tels que le meuble (- 4,1 % sur le semestre selon l’IPEA). Enfin, l’activité de la restauration reste en forte baisse avec un cumul semestriel à – 3,0 %.
Sur les dossiers de plus long terme, Procos reste très préoccupé par plusieurs sujets en ce début d’été. En premier lieu, par l’action de la France et de Bruxelles sur les plateformes chinoises afin de reconstituer au plus vite des règles concurrentielles plus équitables et le respect des normes européennes par tous. «Cela reste un objectif prioritaire et vital car, à défaut, nous ne pourrons que constater l’importante fragilisation d’une partie du tissu commercial dans tous les secteurs concurrencés par ces acteurs», rappelle Procos.
L’Alliance du Commerce s’inquiète des conséquences de la loi anti fast-fashion
La proposition de la loi adoptée le 10 juin dernier par le Sénat, visant à réduire l’impact environnemental de l’industrie textile (dite « PPL Fast Fashion») devrait néanmoins freiner leur développement dans l’Hexagone. Mais l’Alliance du Commerce s’inquiète des conséquences de cette loi sur d’autres acteurs du textile. «Elle fait peser une menace sérieuse sur les enseignes de l’entrée et moyenne gamme implantées en France», insiste l’organisme. «Son article 2 prévoit une pénalité pouvant atteindre 10 € par produit mis sur le marché en 2030, sur la base de critères contestables et sans ciblage spécifique sur les acteurs de la mode ultra express. Une enseigne réalisant 300 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel avec 15 millions de pièces mises sur le marché pourrait ainsi se voir infliger une pénalité allant jusqu’à 150 millions d’euros, soit 50 % de son CA». Un tel dispositif mettrait en péril des «milliers de magasins et des dizaines de milliers d’emplois, dans un secteur du commerce déjà fragilisé par la perte de 50.000 emplois au cours des 18 derniers mois», précise l’Alliance du Commerce.
«Nos enseignes — grands magasins, chaînes d’habillement et de chaussure — représentent 150 000 emplois en France et sont présentes dans plus de 16 000 points de vente. Elles sont engagées dans leur transition écologique mais font face à une concurrence en ligne déloyale sans respect des réglementations et avec des pratiques commerciales et environnementales inacceptables« , note l’Allaince du commerce qui rappelle que pendant ce temps, des plateformes chinoises comme Shein ou Temu «continuent d’inonder le marché français avec un impact environnemental considérable et sans respecter ni les règles de sécurité des produits, ni les règles de fixation des prix, ni les obligations d’information du consommateur. Elles ne paient pas de droits de douanes et bénéficient d’avantages logistiques massifs. Les volumes de produits des pures players ont encore augmenté de +29% l’an dernier».
De premières amendes pour Shein
Shein vient toutefois de se voir infliger une amende de 40 millions d’euros par la DGCCRF. Une enquête a en effet révélé «des pratiques commerciales trompeuses à l’égard des consommateurs sur la réalité des réductions de prix accordées et sur la portée des engagements concernant les allégations environnementales.» Le géant asiatique risque par ailleurs d’encourir une nouvelle amende de 150 millions d’euros, cette fois par la CNIL pour avoir recueilli des données des utilisateurs, sans leur consentement.
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