L’avenir s’assombrit pour les entreprises de services numériques (ESN) tandis que les éditeurs de logiciels et plateformes cloud maintiennent pour l’instant leur croissance.
Avis de grand frais sur le marché du numérique : la croissance va fortement ralentir. Elle ne sera que de 1,8% en 2025 contre 4,1% en 2024. Signal d’alerte pour les entreprises du numérique envoyé par Numeum, le syndicat patronal qui a interrogé ses adhérents soit près de 2500 acteurs du secteur, pour son étude «Tendances et perspectives du marché du numérique en France».
Les prévisions deviennent encore plus alarmantes pour certains profils, notamment pour les entreprises de services numériques (ESN) : le syndicat leur promet une baisse de 2,1% de leur marché, après une modeste hausse de 0,7% en 2024. Les conseils en technologie verraient une baisse de 2,5% après une hausse de 1% l’an dernier. Seules les entreprises éditrices de logiciels et plateformes cloud devraient maintenir leur croissance à 8,2%, même valeur qu’en 2024. «Les secteurs de nos clients, comme l’industrie manufacturière, la banque et le commerce, connaissent une baisse ou une stagnation, réduisant la demande en services numériques», déplore le syndicat.
Le climat économique n’est pas pleinement favorable aux investissements. Mais il n’est pas le seul responsable du ralentissement sur le numérique, selon les auteurs. Qui notent que la tendance «move to cloud» (IaaS et PaaS) a privilégié les entreprises éditrices des plateformes cloud par rapport aux autres. Celles-ci ont en même temps augmenté les tarifs. Ces deux facteurs ont contribué pour trois points dans les 8,2% de leur croissance prévisionnelle. Mais cette dynamique vers le cloud ne s’accompagne pas de projets nouveaux, ce qui pénalise mécaniquement les activités de conseil en technologies et celles d’intégration et de déploiement des ESN.
La tendance n’est pas nouvelle car elles étaient 81% des entreprises a prévoir une croissance au premier semestre 2023, puis 76% la prévoyaient encore au premier semestre 2024, mais seulement 55% au premier semestre 2025. Elles étaient 27% à anticiper une décroissance lors de la dernière enquête. Une tendance inquiétante.
Des projets avec l’IA mais un manque d’investissement
L’essor de l’IA viendrait-il sauver la mise des ESN et autres entreprises de conseil ? «La prise de conscience des opportunités offertes par l’IA progresse nettement, avec 48% des entreprises qui déclarent travailler sur des projets d’IA générative, contre 29 % au second semestre 2023», constate l’étude. Les investissements ne suivent pas toujours. Premier obstacle désigné : la difficulté à identifier des cas d’usages à forte valeur ajoutée, a été signalée par 47% des répondants. Le manque de compétences pour maitriser cette technologie nouvelle est un autre facteur frein, pour 47% des répondants également. Les deux sont naturellement liés, sans compétences spécifiques sur l’IA, on ne saura pas construire un projet à forte valeur ajoutée pour l’entreprise. La formation à la nouvelle technologie fait défaut.
Le manque de croissance du secteur risque de se traduire par un coup de rabais sur les ressources humaines. Un tiers des entreprises adhérentes ayant répondu au sondage avaient déjà constaté une diminution du taux d’occupation de leurs équipes au premier trimestre de cette année. Signe que la réduction des effectifs n’est pas bien loin. Les auteurs de l’étude ne disent pas autre chose : « La situation actuelle pousse nos entreprises à adopter une approche prudente en matière de recrutement, en particulier pour les jeunes diplômés et alternants, avec une baisse prévue en 2025 : 36 % des répondants anticipent une diminution des recrutements dans cette catégorie. Par ailleurs, le secteur numérique enregistre un recul de l’emploi en 2024, effaçant les créations nettes d’emplois intervenues en 2023. Ainsi, le niveau d’emploi revient à celui de 2022, soit environ 666 000 postes ».
Ce ralentissement risque d’être aggravé par des réductions budgétaires à venir. Numeum demande au gouvernement de ne pas réduire le soutien public à travers les plans du Crédit d’impôt recherche, Crédit d’impôt innovation, Jeune entreprise innovante, l’amortissement fiscal pour les PME innovantes.
Les auteurs rappellent que la France se classe au vingt-deuxième rang européen en matière d’utilisation du numérique dans les entreprises. Une position qui laisse peu de marges, avec le numérique qui contribue pour 5,5% du PIB – contre 10% aux États-Unis. Véronique Torner, présidente de Numeum met en garde : «notre dernière enquête montre que les acteurs économiques sont plus soucieux de maîtriser voire de réduire leurs coûts à court-terme plutôt que d’engager des stratégies d’investissement pour le futur. Ces chiffres sont révélateurs des tendances à venir au niveau macroéconomique : le numérique est en effet l’oracle de notre compétitivité. Il est urgent d’inverser la tendance car la France risque de décrocher sérieusement de la compétition internationale».
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