Dupes et campagnes de désinformation en ligne menacent les maisons de luxe

Temps de lecture : 5 minutes

marché des dupes @clesdudigitalAmplifié par les réseaux sociaux, le marché des « dupes », ces imitations de produits de luxe vendues moins chères que les originaux, est en pleine expansion et fait mal au secteur. Pour le combattre, certaines marques proposent des certificats digitaux de propriété, assortis de services aux acheteurs.

Le marché de la contrefaçon, en particulier dans l’univers du luxe, ce n’est pas nouveau. Mais depuis peu les griffes font face à un autre phénomène qui prend de l’ampleur : celui des «dupes», forme abrégée de «duplicate» en anglais, ces articles haut de gamme promus par certains fabricants chinois, appelés «Pingti» en Chine. Ce terme qui signifie «leurre» en mandarin, désigne des copies de produits de luxe, reproduisant des finitions haut de gamme et provenant parfois des mêmes fournisseurs que ceux de grands noms du luxe.

Entre 2020 et 2025, l’index Google des recherches sur les dupes de marques de luxe a été multiplié par 2,7 selon un article du Journal du Luxe. Les recherches de dupes pour le sac Birkin d’Hermès auraient été multipliées par 60, portées par la vente à environ 80 dollars d’un article sous le nom de Wirkin, par Walmart. Ces produits peuvent être achetés facilement sur des plateformes de commerce en ligne telles qu’Alibaba, Shein ou Temu, voire même sur Amazon; Et il devient de plus en plus facile de s’en procurer sur TikTokShop qui vient de se lancer en France ou sur des marchés parallèles via des comptes de dropshipping depuis la Chine. Des plateformes, comme le site américain Myaesthetic.ai, promettent par ailleurs, grâce à l’intelligence artificielle, de trouver des produits similaires et des alternatives abordables à partir des images envoyées par les utilisateurs.

marché des dupes @clesdudigitalLes achats de « dupes », une nouvelle tendance en vogue

Cette recherche de «dupes» est de plus en plus décomplexée en particulier chez les plus jeunes influencés par les réseaux sociaux. Certains sites d’ailleurs ne se cachent pas, affichant haut et fort leur positionnement : « nos dupes de parfums renommés allient sophistication et durabilité, le tout à des prix compétitifs », indique ainsi le site Équivalence du luxe dont les propriétaires affirment avoir voulu réinventer l’accès au luxe face à l’augmentation constante du coût de la vie. «Dans le monde des créateurs de mode, une étrange contradiction est en train d’émerger. Alors que les produits contrefaits sont largement condamnés, les « dupes », sosies non officiels qui imitent le modèle sans copier le nom ou le logo, sont salués comme une tendance élégante et accessible», notent les équipes de Trust Place. «C’est parfois une forme de «revenge shopping». Des clients se vengent car ils estiment que certaines marques de luxe pratiquent des prix abusifs», observe Didier Mattalia, cofondateur de Trust Place.

doter les articles de certificats digitaux @clesdudigital
Didier Mattalia

«Des escarpins Chanel aux sacs Saint Laurent, aucune signature n’est à l’abri. Ces sosies offrent l’illusion du luxe à moindre coût, mais ils ont un prix élevé pour les marques. Au-delà de la tendance, ils reflètent une perte plus profonde de valeur, de crédibilité créative et de rentabilité à long terme», analyse le prestataire qui note aussi les impacts négatifs pour le marques, à commencer par une érosion de la valeur perçue et des pertes de légitimité créative mais aussi de revenus avec un détournement de clientèle, ainsi qu’une concurrence déloyale sur le marché de l’occasion. De plus, les canaux de distribution sont aussi affaiblis car les revendeurs et les partenaires sont confrontés au scepticisme croissant des acheteurs et à des problèmes de confiance.

Des influenceurs chinois dénoncent les prix des marques occidentales

A cela s’ajoutent des campagnes de désinformation massives sur les réseaux sociaux. A la mi-avril, au moment ou la guerre tarifaire entre les États-Unis et la Chine battait son plein pour promouvoir le «Made In China», des campagnes menées en anglais principalement sur TikTok mettaient en avant des influenceurs chinois prenant la parole directement depuis les usines. Leur objectif ? Valoriser la qualité de leur production face aux marques occidentales et dénoncer leurs prix largement exagérées. Selon la société Bloom Social Analytics qui scrute les contenus des réseaux sociaux et a analysé ce phénomène, cette campagne d’influence coordonnée visant les marques de luxe occidentales avec la France en première ligne, a généré plus de 2 milliards de vues après s’être propagée à d’autres plateformes que TikTok.

marché des dupes @clesdudigitalLe difficile combat des griffes de luxe

Pour les griffes de luxe, le combat n’est pas gagné. Ces «dupes » échappent en effet à la qualification de contrefaçon de marque car ils ne reproduisent pas leurs logos. Selon Novagraaf, conseil en propriété intellectuelle, cette absence de marque et de logo sur les «Pingti» complexifie leur qualification juridique. Il devient plus difficile de démontrer une atteinte directe à une marque déposée. Elles doivent donc combiner tout un arsenal de solutions juridiques et marketing pour défendre leurs créations. Certaines se tournent vers l’authentification numérique. Une technologie que défend notamment Trust-Place avec son certificat numérique. «Chaque article de mode bénéficie d’un certificat d’authenticité infalsifiable. Il rassure les acheteurs, notamment sur le marché de l’occasion, et permet de distinguer clairement l’original de la contrefaçon. C’est un moyen concret de préserver la valeur de la marque et de fidéliser la clientèle à long terme», promet l’entreprise qui met aussi en avant cette importance de l’expérience client. «Le client qui achète un produit de luxe attend aussi des services, de l’émotion et une expérience. C’est ce que l’on apporte avec notre solution. A travers un produit muni d’un certificat, le client peut accéder à un univers exclusif. Il peut aussi plus facilement le revendre. Avec cet ID unique, la marque quant à elle accède à une meilleure connaissance de son client», souligne Didier Mattalia.

Un certificat authenticité complémentaire au DPP

L’an dernier, la marque de mode Isabel Marant a fait appel à cette solution pour pouvoir authentifier les pièces, assurer leur suivi, mais aussi lutter contre les contrefaçons et les marchés parallèles tout en offrant à sa clientèle l’accès à des contenus exclusifs, des ventes en avant-première, des informations sur la traçabilité ou les coulisses de la maison ou encore des invitations à des événements. Ce certificat est complémentaire et peut intégrer le DDP (Digital Product Passeport), initiative réglementaire européenne qui vise à collecter, enregistrer et partager les informations relatives à un produit, donnant accès notamment à des informations sur sa durabilité et sa réparabilité.

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