Le commerce parisien flotte mais ne coule pas

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Paris activité commerces @clesdudigital En s’adaptant à l’évolution des modes de consommation, le commerce de proximité tire son épingle du jeu et Paris reste un moteur de l’activité en commerces selon un rapport de Selectirente.

Les magasins ferment et les magasins ouvrent à Paris. Pour les près de 3000 magasins qui ont fermé depuis 2020, il y aura près de 3 000 ouvertures potentielles portées dans 190 plans de développement annoncés par des retailers en 2024. Le commerce parisien «flotte mais ne coule pas», conforme à la devise de la capitale. C’est la conclusion heureuse d’une étude réalisée par Selectirente, une société foncière spécialisée en murs de commerce. Dans cette étude qui portait essentiellement sur la résistance du commerce de proximité, avec un focus sur la rue de Rivoli, elle a analysé la dynamique commerciale parisienne en recoupant nombre de sources issues des opérateurs publics et privés : Ville de Paris, Ademe, CNC, Fevad, Procos et aussi Knight Frank, Cushman & Wakefield et quelques autres.

Dans ce panorama, Selectirente s’attache tout d’abord à démontrer la mutation des commerces de proximité qui se veulent en phase avec la mutation de leur époque, avec la généralisation de l’automatisation, du paiement sans contact et des caisses automatiques devenus incontournables dans les magasins. De nouveaux concept stores voient le jour « pour des expériences d’achat différenciantes  servant de bancs d’essai pour les marques, leurs produits et de nouvelles expériences clients. » Les flagships continuent de s’implanter notamment à Paris. Déjà expérimenté avec succès dans de nombreux points de vente, le phygital « démontre l’existence bien réelle d’une complémentarité réciproque entre commerce physique et e-commerce ».  Selectirente rappelle aussi les facteurs de soutien aux achats physiques (souvent contestés) comme « La Ville du Quart d’heure », adoubé par la Mairie de Paris, et déployé dans de nombreuses villes de part et d’autre de l’Atlantique, ou le recours aux mobilités douces (marche à pied, transports en commun, vélos, véhicules électriques…) qui facilitent les déplacements vers les commerces de proximité installés dans les centres-villes. Le spécialiste met aussi en avant les programmes « Action Cœur de Ville », le rôle du Conseil National du Commerce (CNC) ou encore la législation en 2023 sur les darkstores qui ont été catégorisés en entrepôts pour ne pas concurrencer les commerces de proximité et on entrainé les départs de Getir et Flink du territoire français.

Paris activité commerces @clesdudigitalUne croissance en partie portée par des enseignes étrangères

Sur le terrain, si les fermetures avaient durement frappé le secteur de la mode, les ouvertures reflètent mieux l’évolution de la demande : drives, magasins de seconde main, discounters, coffee shops, chocolateries haut de gamme, retailtainment… La croissance est en partie portée par des enseignes étrangères : elles étaient 65 à ouvrir un premier point de vente en France, dont 48 à Paris, en 2023. Avant une hausse spectaculaire en 2024, quand elles étaient 91 à ouvrir un premier point de vente en France, dont 70 à Paris. Et 75 retailers nouveaux les auraient rejoints durant les six premiers mois 2025, selon les auteurs de l’étude. Qui citent les marques Farm Rio, Alohas, Hoka, Subdued, Flabelus dans la mode, Klättermusen dans l’outdoor, Pink Gellac dans les cosmétiques.

La vacance commerciale dans les vingt-quatre rues les plus recherchées de Paris ne dépasse pas 4,4%. Dans la rue de Rivoli, par exemple, la vacance réelle n’est que de 3,3%. Cette artère est réputée pour le commerce mass market et middle market, ce qui fait déjà pas mal de monde. Elle est aussi connue pour ces valeurs locatives plutôt douces, comprises entre 2500 et 3500 € le m² par an. A noter que d’autres études indiquent des loyers dépassant les 4 000 € le m², mais ça ne change pas l’ordre de grandeur. Aucune comparaison possible avec les Champs Élysées tout proches où il faudra multiplier les montants de loyers demandés par x5 ou x7.

La rue de Rivoli fait le plein de visiteurs

Encore plus important que les loyers, c’est la transformation récente de cette artère en zone de mobilité douce qui aurait permis d’augmenter la fréquentation : elle a cru de 29% entre 2020 et 2023 et encore de 11% en 2024.

En tout, la rue de Rivoli enregistre 8,62 millions de visiteurs par mois. Et les déplacements pour un motif d’achat augmentent. La transformation a fait diminuer la pollution, le bruit et les embouteillages, elle a amélioré le confort de vie en incitant les consommateurs à flâner plus longtemps… et à dépenser plus.

L’étude souligne le lien entre la hausse de la fréquentation des grandes artères commerçantes à Paris et la reprise du tourisme soutenue par les JO et par la réouverture de Notre-Dame de Paris, avec plus 3,7% de passagers dans les aéroports parisiens, et surtout plus 21% de touristes américains qui redécouvrent la Ville lumière, avantagés par leur pouvoir d’achat élevé. Les touristes asiatiques sont également de retour.

Paris activité commerces @clesdudigitalHybridation des canaux

Ce public sera sensible à la mutation du commerce parisien autour du développement des concept stores et du phygital avec l’hybridation des formats de distribution, deux tendances qui devraient se renforcer en 2025. La complémentarité réciproque entre commerce physique et e-commerce dans le contexte phygital devient incontournable. «Toutes les enseignes de prêt-à-porter qui ont disparu n’avaient pas ou pas assez développé le canal digital», préviennent les auteurs. Le « webbrooming » et le « showrooming » deviennent des instruments nécessaires du modèle où le physique supporte le digital et vice versa.

Parmi les secteurs d’activités qui en profiteront, hormis la restauration et les loisirs, «le sportswear, la cosmétique et le healthcare devraient poursuivre leur dynamique porteuse. Le recentrage sur la famille et le bien-être personnel est une tendance lourde», selon les auteurs.

Dans ce rapport, Selectirente n’aborde pas la situation d’une autre artères emblématique de Paris, celle du boulevard Saint Michel, qui avec près de 15 % de ses locaux commerciaux vacants, détient le triste record des boutiques fermées à Paris. La dernière enseigne à avoir baissé le rideau est la boutique King Jouet qui a fermé ses portes fin mars. « Le boulevard Saint-Michel est emblématique de ce qui se joue aujourd’hui dans de nombreux quartiers de Paris et ailleurs : une mise sous pression du commerce de proximité, pris en étau entre loyers inaccessibles, spéculation foncière, plateformes de livraison et fast fashion. Face à cela, notre responsabilité est d’agir. C’est pourquoi nous activons tous les leviers à notre disposition : recours à la taxe sur les friches commerciales, demande d’une expérimentation d’un encadrement des loyers commerciaux, dialogue renforcé avec les propriétaires, et soutien à l’installation de nouveaux projets à travers Paris Commerces », a déclaré Nicolas Bonnet Oulaldj, adjoint à la Maire de Paris en charge du commerce qui en appelle aussi à l’’État qui « doit également prendre ses responsabilités »».

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