Conforama réduit sa fraude grâce à une gestion intelligente des paiements

Temps de lecture : 5 minutes

Conforama stratégie lutte fraude @clesdudigitalConforama a repensé sa stratégie de lutte contre la fraude et d’optimisation des paiements et en récolte les fruits. En deux ans, l’enseigne aurait divisé par quarante son taux de fraude brute tout en divisant par trois ses faux positifs.

Dans un contexte de digitalisation accélérée, la gestion des paiements ne relève plus uniquement de la sécurité : elle devient un levier de performance commerciale. C’est sur ce constat que repose la stratégie déployée par Conforama pour sécuriser ses parcours d’achat, tout en fluidifiant l’expérience client. Le virage engagé ne s’est pas limité à un simple ajustement technique. Il s’agit d’un repositionnement tactique qui fait de la maîtrise de la fraude, un potentiel de croissance.

Avec 15 % de son chiffre d’affaires réalisé en ligne, soit environ 240 millions d’euros sur un total annuel de 1,6 milliard, l’enseigne est exposée aux risques inhérents au e-commerce. Ces dernières années, la fraude connectée s’est intensifiée et diversifiée. Là où les tentatives étaient autrefois grossières ou localisées en magasin (faux billets, chèques frauduleux), elles ont désormais migré vers des environnements numériques plus complexes. Les fraudeurs exploitent les failles du système en jouant sur des schémas agiles, souvent indécelables à l’œil nu.

Une double ambition : sécuriser et optimiser

«Le paysage de la fraude a changé de nature. Elle est aujourd’hui plus ciblée, plus rapide, plus digitale. Et surtout, elle coûte cher. Pas uniquement en pertes, mais aussi en opportunités manquées», analyse Lucas Quinio, responsable des paiements chez Conforama, qui s’est exprimé sur cette problématique au rendez-vous One to One Retail E-commerce Monaco.

La réponse de Conforama à cette évolution a reposé sur deux piliers : maîtriser la fraude pour réduire les pertes et optimiser le parcours de paiement pour maximiser les revenus. Pour y parvenir, l’entreprise a fait le choix de s’appuyer sur Forter, une solution spécialisée dans l’identification digitale et l’analyse comportementale, basée sur un modèle de machine learning alimenté par plus de 1,8 milliard d’identités à l’échelle mondiale.

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Lucas Quinio

Ce changement de cap s’est accompagné d’un rejet du modèle traditionnel à règles fixes. «Nous étions encore dans un système où l’on refusait des commandes selon des règles statiques : une IP provenant d’un pays jugé à risque, un montant élevé, un produit spécifique», explique Lucas Quinio. «Mais ce type d’approche est non seulement inefficace, il est aussi dangereux, car il bloque de bons clients.»

L’ancien système bloquait ainsi jusqu’à 4 % des transactions jugées à risque, parfois à tort. «Aujourd’hui, nous sommes descendus à 1,5 %, avec un taux de fraude brute divisé par 40.» En valeur, cela représente une réduction du taux de fraude de 0,8 % à 0,02 %, un niveau très en dessous de la moyenne nationale estimée à 0,25 %. «Notre objectif est simple : ne plus perdre un bon client à cause d’un excès de prudence.»

Automatiser sans aveuglement

Le modèle Forter repose sur une automatisation complète de la prise de décision, sans intervention humaine à chaque étape, mais avec une capacité d’apprentissage continu. «Ce qui fait la différence, ce n’est pas l’algorithme en soi, c’est la qualité de la data qu’on lui fournit», souligne Lucas Quinio. «Nous avons passé des mois à structurer nos flux d’informations pour que le système prenne des choix éclairés.»

La phase de mise en œuvre a ainsi été largement consacrée à la sélection des données pertinentes, à leur conformité avec le RGPD, et à la sécurisation des échanges. Une attention particulière a été portée au traitement des cas «difficiles», notamment dans les situations d’impayés ou de crédits échoués. «Tous les défauts de paiement ne sont pas des fraudes», insiste-t-il. «Il y a une vraie responsabilité sociale dans la manière dont on alimente un modèle prédictif.»

De la détection à la prévention

L’élément clé du succès réside dans la capacité à intervenir en amont, avant même que la fraude ne se matérialise. Forter fonctionne à chaque étape du parcours client : création de compte, authentification, ajout au panier, validation de la commande, choix du mode de livraison ou de paiement. Ce maillage permet d’identifier les comportements suspects avec une précision accrue. «Nous avons observé une chute drastique de la fraude au 3DS, notamment les cas d’ingénierie sociale qui touchaient des clients vulnérables», indique Lucas Quinio.

Certaines typologies de fraude ont quasiment disparu, mais d’autres apparaissent, plus subtiles. Les fraudeurs ciblent désormais des produits plus faciles à revendre rapidement, comme les smartphones, ou contournent les contrôles via des systèmes de remboursement abusifs. D’où l’intérêt d’un suivi dynamique des signaux faibles. «Le modèle Forter nous permet de détecter très tôt les attaques organisées, par exemple lorsqu’un même produit est ciblé dans plusieurs paniers sur une courte période», ajoute-t-il.

Des résultats opérationnels mesurables

Les bénéfices sont tangibles, tant sur le plan financier qu’en matière de performance opérationnelle selon l’enseigne. À date, le taux de fraude brut mesuré par les acquéreurs est passé sous la barre des 0,02 %, ce qui améliore directement le scoring de Conforama auprès des réseaux bancaires. «Ce n’est pas un détail. Moins vous êtes risqué, plus vos paiements sont acceptés rapidement, ce qui influe sur le taux de conversion global.» En parallèle, la baisse des faux positifs a permis de capter davantage de clients légitimes. «Chaque transaction sauvée est un client en plus, et souvent une valeur client à long terme préservée.»

La solution offre également un pilotage fin grâce à des tableaux de bord détaillés. «J’analyse par exemple les comportements d’achat sur certaines catégories sensibles, comme les trottinettes électriques. En cas de pic inhabituel, je peux agir immédiatement.» Cette capacité d’ajustement rapide contribue à faire de la lutte contre la fraude un levier d’anticipation plus que de réaction.

Conforama stratégie lutte fraude @clesdudigitalUne approche intégrée et évolutive

Au-delà des résultats chiffrés, la mise en œuvre de Forter a eu un impact organisationnel. En sécurisant les paiements, Conforama a pu allouer davantage de ressources à d’autres fronts, notamment la logistique des retours, autre canal de fraude en développement. «Fermer une porte ne suffit pas. Il faut surveiller toutes les fenêtres», résume Lucas Quinio. L’intégration de Forter est également en cours chez But, autre enseigne du groupe, avec une logique d’harmonisation des pratiques et de mutualisation des enseignements.

La collaboration avec les équipes cybersécurité a par ailleurs été renforcée. La segmentation des responsabilités permet de mieux répartir les efforts : à Forter la sécurisation du paiement, aux équipes IT la protection des comptes clients et des infrastructures. Cette complémentarité ouvre la voie à de futures évolutions, notamment sur la gestion des identités ou l’authentification contextuelle.

C’est précisément ce qui charpente la vision portée par Forter : une lutte contre la fraude qui dépasse le simple cadre du paiement. «Ce que nous apportons, c’est la capacité à reconnaître un bon client, même atypique, sans sacrifier la sécurité ni l’expérience», estime Manon Bouchard, senior solutions consultant chez Forter. «L’objectif n’est pas de tout bloquer, mais d’autoriser davantage avec confiance.»

Un modèle reproductible dans d’autres verticales

Le cas Conforama illustre une tendance de fond dans le retail : l’automatisation de la lutte contre la fraude comme levier de performance globale. Ce modèle, reposant sur la donnée, l’IA et une gouvernance responsable, est d’autant plus pertinent qu’il est transposable à d’autres secteurs du e-commerce, qu’il s’agisse de l’électronique, de la mode ou de l’alimentaire. «Le but n’est pas d’éliminer toute fraude, ce qui serait illusoire. Le but est d’être meilleur que ses concurrents», rappelle Lucas Quinio. Alors que les cybermenaces continuent d’évoluer, les retailers doivent réinventer leurs pratiques. L’expérience de Conforama montre qu’une approche proactive, fondée sur la donnée et l’intelligence artificielle, permet non seulement de se protéger, mais aussi de croître. Une transformation qui exige rigueur, transparence et une gouvernance technologique maîtrisée.

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