Maud Caillaux : l’urgence climatique en ligne de mire

Temps de lecture : 4 minutes

une banque pour financer la transition écologique @clesdudigitalAprès un parcours rapide dans la mode, Maud Caillaux a cofondé Green-Got, une néo-banque pour financer la transition écologique.

Maud Caillaux, qui rêvait dans sa jeunesse «de dessiner des robes et des chaises» et ce serait bien vue devenir designer, a pris un grand virage il y a près de trois ans. Cette douée en math qui a suivie une prépa HEC et est dotée d’un master entrepreneuriat, a tout lâché pour créer une banque. Et pas n’importe quelle banque puisqu’il s’agit d’un organisme chargé de financer la transition écologique. «Je suis très attachée à la nature, à la ville de Dijon où j’ai vécu. Face au changement climatique, je ne pouvais plus continuer à vivre comme si rien ne se passait», explique-t-elle. Si ses premières expériences professionnelles la conduisent dans la mode, notamment chez Berluti, Dior ou au sein de la start-up Euveka qui a développé un mannequin-robot, elle découvre l’univers bancaire au CIC à New York puis comme consultante chez Cap Gemini pour la Société Générale en France. «Mes premières expériences professionnelles m’ont surtout montré ce que je ne voulais pas faire. Elles m’ont aussi apporté mes premières compétences».

C’est en écoutant un podcast de l’astrophysicien Aurélien Barrau qu’elle prend véritablement conscience de l’urgence climatique. «En 20 000 ans, seulement 5°C de variation de la température moyenne terrestre ont provoqué la fonte des glaces. Que va devenir ma belle Bourgogne ?», se demande alors la jeune femme. La réalité brutale va bouleverser son horizon professionnel et elle met dès lors toute son énergie pour entreprendre dans une activité en adéquation avec ses convictions. «J’ai étudié ce qui était le plus néfaste pour l’environnement. L’argent est le nerf de la guerre. Et les banques ont investi massivement pour financer les énergies fossiles, le pétrole, le charbon. J’y ai travaillé et j’ai compris leur mode de fonctionnement et leur inertie. Quand je suis rentrée en France, j’ai épluché des tas de rapports sur le sujet».

une banque pour financer la transition écologique @clesdudigitalElle se met notamment à lire les rapports de l’Oxfam et diverses études qui démontrent que la finance est la première source d’émission de CO2 dans le monde. Les quatre plus grandes banques françaises émettant ainsi cinq fois plus de CO2 que la France entière selon l’entrepreneuse. Sa décision sera donc de créer une néo-banque verte. Un projet «qui semble un peu fou» comme elle l’avoue elle-même et qu’elle va mener avec Andréa Ganovelli qui a étudié comme elle à Grenoble École de Management et Fabien Huet, qui a commencé sa carrière dans les systèmes d’information financiers et les rejoindra comme CFO pour assurer la partie technique. Tous les trois partagent les mêmes convictions en matière d’écologie. «Il n’y pas de page Wikipédia pour lancer une banque et tout se construit avec des rencontres. Il faut trouver les financements et s’accrocher. Et avec le soutien des personnes qui ont cru en notre projet, dont les 200 000 personnes inscrites en liste d’attente, avec le soutien aussi de la famille, on y arrive», estime la jeune femme qui pense avoir hérité du caractère bien trempé de sa maman, médecin, et d’origine iranienne.

Estimer l’empreinte carbone de chaque achat

Il y a quelques mois, en avril et après avoir déposé tous les dossiers réglementaires, la néo-banque Green-Got, une appellation qui n’est pas sans rappeler la banque des sorciers «Gringotts» de l’univers Harry Potter, s’est ouverte aux particuliers. Après un service pour les comptes courants, l’épargne sera bientôt disponible. Par ailleurs, les souscripteurs peuvent estimer l’empreinte carbone de chacune de leur dépense grâce à un calculateur qui mesure celle de tous leurs achats. Il se se base sur des données européennes comme l’Ademe, et d’autres bases de données carbone, des études statistiques et des rapports sectoriels. Les comptes courants Green-Got peuvent financer trois projets différents dont la protection de la forêt amazonienne. Dans le premier «rapport d’impact» publié après quatre mois de lancement officiel et portant sur les trois projets de décarbonation et de préservation de la biodiversité qu’elle soutient, la jeune banque annonce 2 500 tonnes de CO2 stockés ou évités, 623 000 m2 de forêt amazonienne sanctuarisé et 3 450 m3 d’eau des océans dépollués en plastique.

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Dans un second temps, la jeune banque pourra s’ouvrir à des professionnels. Mais pour l’instant, il s’agit de convaincre les particuliers. Ils sont déjà 8500 et elle espère en compter plus de 10 000 en fin d’année. «80% ont plus de 25 ans et la moyenne d’âge est de 32 ans. Mais de plus en plus de personnes se sentent concernées aujourd’hui». La jeune institution fait aujourd’hui travailler 35 personnes. «C’est pour moi beaucoup de satisfaction même si l’investissement est monstrueux. Mais plus tard je pourrais dire à mes enfants que j‘aurais tout essayé. L’objectif est aussi d’inspirer nos grandes sœurs, les grandes banques, pour qu’elles changent», ajoute Maud Caillaux qui a été nommée dans le classement des «30 Under 30» de Forbes en 2021, un palmarès dont l’objectif est de mettre en lumière de jeunes entrepreneuses et entrepreneurs de moins 30 ans qui bouleversent l’ordre établi. Et quand elle retourne dans sa Bourgogne natale, la jeune dirigeante trouve encore un peu de temps pour s’adonner au dessin et à l’aquarelle, un univers bien loin de la finance.

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