Dotée d’une insatiable créativité, Valérie Dagand s’engage pour la place des femmes dans le monde du numérique et se lance dans une nouvelle aventure entrepreneuriale pour accompagner les entreprises à intégrer rapidement l’IA dans leurs enjeux métiers.
Créativité et transmission sont des mots qui la font vibrer. Valérie Dagand a toujours voulu avancer dans les savoirs, eu l’envie de transmettre et d’exprimer des idées. Toute jeune elle se voyait maitresse d’école. Un peu plus tard, elle imaginait suivre un cursus artistique, associant son esprit créatif au domaine des arts. Mais la sagesse l’oriente vers une prépa HEC puis une école de commerce car cette bonne élève se rend compte que la créativité n’est pas seulement réservée aux beaux-arts. «Il y a aussi beaucoup d’idées chez les marketeurs», convient Valérie Dagand, aujourd’hui dirigeante et cofondatrice l’IA Campus.
Très vite après un premier stage aux RH de Prisunic, elle se passionne pour la distribution, «un univers qui ne cesse de se réinventer». Elle obtient un master en agro-alimentaire et distribution à Marseille. S’ensuit un nouveau stage à l’Institut Français de Merchandising, une structure paritaire créée en 1972 qui rassemble toute la communauté industrie et commerce et surveille les nouvelles technologies du retail. Un sujet qui l’intéresse tout particulièrement. Valérie Dagand entre alors chez Monoprix au titre de responsable des nouvelles technologies au sein du marketing et sous la direction de Gérard Gallo. Ce professionnel deviendra dès 2003 directeur général de L’Échangeur, qui était alors un vaste espace d’exposition et de formation créé à l’initiative du groupe Galeries Lafayette.
Portée par l’innovation
Les sujets sont nombreux, Internet détrône le Minitel et tout est à construire. Valérie Dagand se projette déjà dans l’e-commerce. Elle conçoit et lance de premiers services numériques avec les sites corporate et e-commerce de Lafayette Gourmet, installe de nouveaux services de couponing et des bornes interactives en magasin. Elle participe à l’aventure Telemarket, un pionnier des cybermarchés en France, alors filiale des Galeries Lafayette (il deviendra ensuite U-Telemarket après son rachat par le groupement Système U et cessera son activité en 2013). «Ce furent quatre années magique en accéléré. J’ai eu la chance d’être avec les bonnes personnes au bon moment», estime Valérie Dagand qui quitte cet univers de la distribution pour rejoindre celui encore très nouveau des «web agencies» en intégrant Connectword Agency, une filiale du groupe Havas. Devenue directrice conseil web pour les marques Christian Dior Parfums, Le Bon Marché ou encore Givenchy, elle doit convaincre le luxe encore frileux face au digital. Les plus beaux sites graphiques sont en flash et les premiers programmes CRM voient le jour.
Puis c’est le retour chez l’annonceur pour cette fois repositionner Printemps.com au sein du groupe PPR, qui compte alors dans son portefeuille les enseignes Printemps, Fnac, Conforama, Citadium, Kadeos (PPR deviendra Kering en 2013 après s’être séparé de Conforama et la Fnac, et vendu Redcats, propriétaire de La Redoute). Valérie Dagand travaille aux côtés de Bruno Teboul et de Benoit Rigaut et participe à la création d’une filiale numérique pour conduire la transformation digitale. Il s’agit de concevoir et de gérer une place de marché numérique, omni-canal et multi-enseignes pour les listes de mariages et de cadeaux qui représentent une bonne partie du chiffre d’affaires des grands magasins et de contrer de nouvelles plateformes qui arrivent sur le marché. Le plus grand programme CRM de PPR est alors mis sur les rails avec le développement des activités e-commerce dans dix pays. Une innovation saluée d’un trophée par le milieu professionnel.
Puis ce sont les Aéroports de Paris qui vont la solliciter. Recrutée au poste de chief digital & communication officer, elle est chargée de «diriger la transformation culturelle et digitale» de l’entreprise afin de préparer son introduction en bourse. «Il s’agissait de changer l’image de marque pour ce passage de ADP à Aéroports de Paris». Son périmètre à la fois institutionnel, commercial, événementiel, digital, est vaste. Elle crée un site internet, une agence de voyage, une nouvelle chaine de télé dans les salles d’embarquement, développe de nouveaux axes business, des activités e-commerce, cross-canal et web-to-store.
Bâtir et transmettre
Avec ces cycles professionnels de trois à quatre ans, Valérie Dagand se considère comme «une développeuse». «J’aime partir d’une feuille blanche et bâtir». C’est avec cet état esprit qu’elle arrive chez Televista, une start-up imaginée par Philippe Gildas et Gaspard de Chavagnac. La chaine uniquement diffusée sur CanalSat et Numéricable et destinée aux plus de 45 ans a besoin de sa directrice du marketing et du numérique pour son lancement. «J’aime ces changement d’univers. L’innovation s’enrichit par ces cumuls d’expérience dans différents secteurs. Cette fois il fallait créer une filiale interactive. J’ai découvert comment construire un média». Au bout d’un an et demi, la chaine attire un million de visiteurs tous les mois mais les annonceurs se font attendre. «Grâce à la data, nous avons revu notre positionnement et notre modèle». Décision est prise de cibler plus précisément les femmes de plus de 35 ans, alors surreprésentées, et de faire de Vivolta une chaîne de référence dans le domaine de l’art de vivre au féminin.
Pour Valérie Dagand, c’est aussi le moment de prendre du recul et de compléter son cursus avec un MBA ingénierie et finance. Elle fait du «management des millenials» le thème de son mémoire et se passionne pour le sujet, créé sa propre agence de conseil et de formation dédiée aux cadres supérieurs, puis lance avec Barbara Sohier et Eric Walter la première plateforme de réservation en ligne d’événements, baptisée Evenby. C’est avec cet outil, sans doute trop précurseur pour l’époque, qu’elle accompagnera Hervé Bloch dans le lancement du premier événement des BigBoss à la montagne. Et c’est aussi à l’occasion du dixième anniversaire de cette édition en ce mois de décembre qu’elle annoncera le lancement d’IACampus, un Lab d’innovation et de formation à destination des métiers et du business.
Mais entre temps, Valérie Dagand donnera des cours dans des écoles de commerce, deviendra chief digital officer chez Vinci Autoroutes, un nouveau poste au sein d’un univers très masculin et peu amène. Sa mission est d’assurer la transformation digitale du groupe métiers et de mettre en œuvre la relation avec les clients. Elle n’y restera que 18 mois avant d’être chassée cette fois pour une plus longue et palpitante mission au sein du Ministère des Armées. «J’ai rencontré l’amiral Coustillère qui a construit la cyberdéfense. Il s’agissait de créer une direction du numérique. J’y ai découvert un univers passionnant».
A la direction générale adjointe en charge de l’orchestration de la transformation numérique au sein de la Direction Générale du Numérique (DGNum), avec près de 200 métiers à embarquer, de l’aéronautique jusqu’à la santé en passant par la logistique, Valérie Dagand devait s’assurer que les conditions soient réunies pour que tout le monde monte à bord. «Nous avons nommé des CDO dans chaque métier». Une «business unit disruptive», une agence de conseil interne dédiée à cette modernisation a été créée. «J’ai développé une vraie capacité d’adaptation, découvert la transformation digitale par l’influence, l’utilisation des outils de négociation». A cours de sa mission, elle préside en 2019 le jury d’une Winter édition des BigBoss et anime une conférence sur «L’armée, la défense & le digital», entrainant avec elle des représentants du Ministère à participer à ces événements professionnels. Elle noue des partenariats externes, créé le « Cercle Défense Connect » réunissant des grands dirigeants, délivre des cours de marketing digital et sur la transformation numérique au CFMD, Centre de formation au management de la défense du Ministère des Armées, et commence aussi à enseigner à l’INSP (Institut national du service public), anciennement ENA. Toujours attachée à cette grande organisation, elle deviendra à la fin de son mandat, officier de réserve opérationnelle, avec le statut de capitaine de frégate. Sa carte d’identité militaire, à portée de main dans son portefeuille, prouve son engagement.
Diversité et « role model »
Un engagement qui vaut aussi pour la cause féminine avec la création en 2018 à l’initiative de Florence Parly, ministre des Armées, de la communauté des Combattantes @Numérique, dont l’objectif est au départ de renforcer l’attractivité des métiers du numérique au sein de la défense et qui s’est élargie au secteur public. «Depuis plus de quinze ans, je suis engagée pour les femmes, pour cet enjeu de diversité dans les métiers et pour créer le monde de demain. Il faut montrer des «role models» aux plus jeunes», affirme Valérie Dagand qui a présidé et est membre de l’association Cyberelles, l’un des premiers réseaux dédiée aux entrepreneures, aux dirigeantes et aux professionnelles de la tech, créé en 2001.
Aujourd’hui, c’est une nouvelle page qui s’ouvre avec le lancement de l’IA Campus aux côtés de Cyrille Kittel, ex directeur général d’Interflora. Sa mission est d’accompagner les entreprises à intégrer rapidement l’IA dans leurs enjeux métiers, quel que soit le niveau de maturité de leurs équipes, d’identifier des cas d’usages, de mesurer les impacts sur les métiers. «Nous y travaillons depuis pas mal de temps et avons pu identifier des experts du sujet». Ce sont 150 spécialistes issus de directions opérationnelles d’entreprises, d’établissements scientifiques, de recherche en digital, de data et d’intelligence artificielle qui interviendront en France et à international. «J’avais besoin de retrouver ma flamme d’entrepreneuse, avoue Valérie Dagand. Au cours de ma carrière, j’ai beaucoup appris de mes chefs, souvent des visionnaires qui m’ont aussi laissé quartier libre pour pousser les murs. Mon épanouissement je le trouve dans la génération d’idées et j’essaie d’enrichir ma vie de créativité». Ses journées bien remplies sont rythmées aussi par une heure de sport tous les jours. Un moment «non négociable» qui participe à son équilibre.
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