Dominique Buinier : infuser des convictions personnelles dans l’entreprise

Temps de lecture : 5 minutes

avancer l'entreprise dans sa démarche responsable @clesdudigitalDominique Buinier a rejoint le cabinet de conseil et de réalisation IT Octo Technology il y a plus de 22 ans. Aujourd’hui directrice des opérations (chief operations officer) et directrice RSE (chief sustainability officer), elle réunit ses deux passions et fait avancer l’entreprise à grand pas dans sa démarche responsable.

Quand elle commence sa prépa pour une admission dans une école d’ingénieurs, Dominique Buinier n’a pas encore fait de plan carrière. «Prototype de la bonne élève», elle est alors poussée par ses professeurs vers ce cursus considéré comme «la voie royale». Elle bénéficiera ensuite d’une bourse Lavoisier, un dispositif du ministère de l’Industrie de l’époque, pour passer un an aux États-Unis dans une école en Californie. «Je voulais apprendre l’anglais et me plonger dans une autre culture. J’avais un projet dans le domaine de l’imagerie médicale. Cela m’apparaissait alors comme un parcours plus noble que les autres matières que j’avais étudiées. Mais le professeur qui devait l’enseigner est décédé et j’ai du choisir d’autres options autour de la robotique et de l’électronique».

De retour en France, elle doit rapidement travailler, envoie une quinzaine de CV et est recrutée chez IBM. C’est un choix de raison. «Un grand groupe, une renommée, cela me servira toujours», estime-t-elle en débutant sa carrière professionnelle. Elle restera finalement dix ans dans cette multinationale spécialisée dans le matériel informatique et les logiciels dans laquelle il est alors compliqué de se faire une place surtout en tant que femme. Les stéréotypes sont encore bien présents. L’un de ses managers lui conseillant même un jour de venir en jupe alors qu’elle préfère les tailleurs-pantalons. «La période dans les années 1993-1994 était devenue ensuite un peu compliquée pour trouver un nouveau job».

Convaincue que business et tech sont indissociables

Durant ces dix années, Dominique Buinier va s’aguerrir. Elle commence comme chef de projet IT, prenant conscience par la même occasion qu’elle «ne sait pas encore nager» dans ce nouveau métier, puis évoluera vers un poste commercial avant-vente qui lui plaira davantage. «J’ai toujours aimé la tech. Ces profils n’étaient pas assez appréciés chez IBM qui leur préférait de loin les commerciaux». Au hasard de ces rencontres chez les clients, Dominique Buinier qui «en a marre des grosses boites» se lie avec François Hisquin. Cet amoureux de l’informatique vient de créer Octo Technology, une start-up de conseil dans les technologies. «Il m’a proposée de les rejoindre. J’appréciais les valeurs de l’homme et de son entreprise, la conviction que business et tech sont indissociables, que l’un nourrit l’autre». L’équipe du début réunit une quinzaine de personnes et seulement deux femmes dont une assistante. Mais Dominique Buinier, maman de deux enfants et bientôt enceinte d’un troisième découvre la bienveillance. «On ne me fixait pas des réunions à 18 heures. Nous étions une communauté soudée». Toujours proche du business, l’ingénieure d’affaires va diriger un pôle mixte de consultants et d’autres profils, être responsable d’une « business unit » banques et assurances, intégrer aussi le Codir dès qu’il est créé. Tous les trois à quatre ans elle change de poste. «J’aime voir comment les choses fonctionnent et j’ai toujours été très active pour des sujets transverses. J’adore défricher puis transmettre pour passer à autre chose».

Alors que Octo grossit, affichant des croissances de 15 à 20% chaque année, Dominique Buinier gère les opérations transverses et garantit la fluidité dans l’organisation. Elle est nommée COO (chief operating officer) alors que François Hisquin a décidé de vendre son entreprise à Accenture. «A ce moment là, nous nous sommes rendus compte qu’avec nos process différents il semblait difficile de faire entrer Octo dans le monde d’Accenture». Les équipes risquent de quitter le navire si ce «Big Five» avale le «petit» cabinet de conseil. Dominique Buinier s’attelle alors avec d’autres collaborateurs à proposer un autre mode opératoire et Accenture écoute finalement les arguments. «Nous sommes restés une filiale, avec notre propre entité légale et avons conservé nos pratiques managériales et notre ADN. Aujourd’hui nous avons trouvé nos complémentarités. Octo conserve son agilité, ses capacités de design qui correspondent à certaines attentes de nos clients et Accenture poursuit des projets à grande échelle. Nous sommes un peu leur poisson pilote»

avancer l'entreprise dans sa démarche responsable @clesdudigitalSensibilisée aux enjeux du changement climatique

Dominique Buinier qui a été un peu «la cheville ouvrière» pour ouvrir la voie de ce nouveau mode opérationnel, a rempli sa mission et déjà son envie d’avancer et de créer la porte vers autre chose. «Je commençais à être sensibilisée aux enjeux du changement climatique. Chez Octo nous avons toujours été une bande de curieux et partagé nos connaissances. Il y avait une musique de fond sur tous ces sujets environnementaux, les théories de l’effondrement qui circulaient. J’ai commencé à me poser aussi des questions sur ma consommation, ai entrepris une démarche vers le zéro déchet, vidé mes placards. C’était d’abord une démarche personnelle».

Ludovic Cinquin qui a été promu directeur général du groupe Octo Technology en 2019 est aussi sensible à cette notion d’engagement pour les entreprises et le cabinet participe régulièrement et depuis plusieurs années au palmarès des « Great Place to Work ». «Nous avions pris soin du collectif mais nous étions encore trop tournés vers l’intérieur», souligne Dominique Buinier qui va le convaincre d’entreprendre une certification BCorp (octroyée aux sociétés commerciales répondant à des exigences sociétales et environnementales, de gouvernance ainsi que de transparence envers le public). «Au départ j’ai réservé une petite salle pour que les personnes intéressées dans la société s’inscrivent à une présentation sur la démarche zéro déchet. Je pensais que nous serions 15 personnes et nous nous sommes retrouvées à 50. Il y avait beaucoup d’attente et d’envie. C’était le bon moment d’y aller». Un groupe de travail formalise le projet, se rend compte aussi qu’il ne dispose pas d’outils de mesure du bilan carbone, puis qu’en tant que prestataire de services, il est un émetteur puissant de gaz à effet de serre.

Aller vers plus de sobriété numérique

Tout ce travail sera en partie interrompu par la crise sanitaire l’obtention de la certification prendra près de deux ans. «Octo a toujours été innovant. Nous avons été parmi les premiers à nous lancer en mode Agile. Cette mission m’a par ailleurs donné un nouveau souffle et m’a permis d’aligner mes convictions d’un point de vue professionnel et personnel». Aujourd’hui la démarche continue et l’entreprise travaille à redéfinir sa « Raison d’Être ». Dominique Buinier a endossé le nouveau poste de directrice RSE. La démarche est désormais portée par le Codir et elle infuse dans tous les services. L’objectif est de réduire les effets de serre de 5% par an et de se mettre au service de projets vertueux. «Ce qui a aussi des conséquences dans les choix de projets. Il faut faire de l’éco-conception de services numériques et conseiller à nos clients d’aller vers plus de sobriété numérique, de ne déployer que les fonctions nécessaires». La stratégie a été étendue au numérique inclusif, avec l’application du Référentiel général d’amélioration de l’accessibilité (RGAA) qui vise a rendre les services numériques plus accessibles et à une plus grande vigilance aussi apportée au codage des algorithmes.

«C’est une vraie chance pour moi de travailler sur tous ces sujets qui touchent aussi la mixité sociale. Mes missions sont désormais très variées et une grande partie d’entre elles concernent des fonctions transverses. J’essaie de faire converger et de faire pivoter les équipes». Dominique Buinier a réussi à accorder vie pro et vie perso et quand elle n’est pas immergée dans la tech, elle plonge ses mains dans la terre. «Je me suis aussi intéressée à la permaculture et suis très sensibilisée par le passage vers une agriculture plus responsable pour une meilleure alimentation», raconte la dirigeante et qui va se ressourcer régulièrement dans son jardin en Bourgogne. «Nous avons entrepris de rénover une maison de manière bio-climatique». Elle anime aussi des ateliers « La Fresque du Climat » qui permettent de comprendre le fonctionnement du changement climatique. Enfin il y a deux ans elle est devenue coach pour accompagner des personnes dans leur parcours professionnel.

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